A Cannes, l’audiovisuel et la création ne se résument pas aux deux semaines du festival international du film, mais constituent le socle d’une filière d’excellence sur laquelle le territoire entend structurer son développement économique.
Entreprises : quels choix d'implantation dans les territoires ?
Pour l’heure, le tapis rouge du palais des festivals est davantage foulé par les touristes mitraillés par leurs proches que par les stars qui y feront la montée des marches dans quelques jours. Et pourtant à Cannes, la filière de l’image et des industries créatives est d’actualité tout au long de l’année. Au-delà du rayonnement de l’événement phare du cinéma, qui accueille chaque année 80 000 festivaliers, la ville et l’agglomération de Cannes ont l’ambition depuis près de 10 ans de faire de leur bassin d’emploi un berceau des industries créatives et culturelles. « Cannes on air » est en effet le projet que mène, depuis son élection en 2014, le maire de la commune David Lisnard, devenu en 2017 président de la communauté d’agglomération Cannes Pays de Lérins (5 communes, 160 500 hab.).
Structure une filière de médias et d’industries culturelles
Fort de 600 jours de tournage par an, d’un festival international dédié à la série, du plus grand marché du film au monde avec plus de 5 000 entreprises représentées et d’un marché international des programmes de télévision (MIPTV), le territoire ne partait pas d’une page blanche. « Les industries culturelles et créatives sont dans son ADN. L’objectif est de structurer l’ensemble de la filière, depuis les activités d’écriture de scénarios jusqu’à la production et la diffusion, et de couvrir toute la chaîne de valeur, étudiants, start-up, entreprises de renom », commente Didier Vescovi, directeur général adjoint en charge du développement territorial à la communauté d’agglomération.
Les médias et les industries culturelles représentent pour l’instant sur le territoire 401 entreprises (sur 26 000 au total), 941 emplois (pour 60 000 salariés au total) et 87 millions de chiffre d’affaires. Société de production créée en 2008, Adastra Films fait partie de celles-là et a suivi les premières étapes de la structuration de la filière sur le territoire. « En 2011, la ville m’a contacté pour intégrer la toute première pépinière créée. Puis nous avons été les premiers a intégré la nouvelle pépinière de Bastide rouge, puis la cité des entreprises il y a un an où nous bénéficions d’un matériel performant, qui accompagne notre développement. De deux collaborateurs, nous sommes passés à six personnes », résume Sébastien Aubert, fondateur de l’entreprise.
L’inauguration il y a un an du campus Bastide rouge sur les hauteurs de la ville, à deux pas de l’aéroport d’affaires Cannes-Mandelieu et à 6 km de la Croisette, a ouvert un nouveau chapitre. Les 3700 m² de Bastide rouge accueillent un campus universitaire de 1 000 étudiants et 185 professeurs, des espaces (pépinière, cité des entreprises, et non loin du site un hôtel d’entreprises) hébergeant 34 sociétés, ainsi que des plateaux de tournage et des studios de production et post-production, un fablab… Tous propriété de la ville et de l’intercommunalité.
« L’investissement s’est élevé à 32,25 millions d’euros TTC soit 23,8 millions d’euros pour la Mairie de Cannes et 8,45 millions d’euros pour l’Agglomération. A cela s’ajoute 850 000 euros d’investissement dans le matériel de tournage et de production », indique Michel Tani, directeur général des services (DGS) de la communauté d’agglomération. Un multiplexe de cinéma (géré après appel à projet de la commune par des exploitants indépendants locaux) et une résidence étudiante en cours de construction (dont l’Office public de l’habitat de Cannes est maître d’ouvrage) complètent l’endroit.
« Sélectionnées en fonction de l’adéquation de leur activité à une filière d’excellence du territoire, de leur caractère innovant et des perspectives de croissance et de création d’emplois, les entreprises hébergées bénéficient de l’accompagnement d’un réseau de 21 partenaires, couveuse, incubateur, réseaux d’entrepreneurs », complète Laure Cayla, directrice de la cité des entreprises et des studios Bastide rouge. Et elles profitent d’un écosystème très porteur. Diplômés en 2021 de l’école d’ingénieurs Polytech à Sophia-Antipolis, les jeunes cofondateurs de French Acoustics, qui produit des enceintes haute performante sans fil, ne s’y sont pas trompés. « En nous installant à la cité des entreprises, nous bénéficions de synergies avec les autres entreprises hébergées, avec les étudiants en formation et avec l’ensemble de l’écosystème cannois, où l’événementiel est très présent et favorise le développement de nouveaux produits par notre société », se félicite un des cofondateurs Damien Virgiglio.
Un enjeu immobilier de taille
Les entreprises accueillies sur le campus Bastide rouge bénéficient également d’un loyer de 10 % à 20 % (selon l’âge de l’entreprise) inférieur à celui du marché. Dans un secteur où le foncier est particulièrement tendu, l’enjeu immobilier est en effet de taille. Le dernier né des trois sites d’hébergement, la cité des entreprises, est déjà rempli à plus de 80 %, et déjà l’agglomération voit plus loin. « Une friche de 5,7 ha va être requalifiée par le privé non loin du campus, qui devrait comporter des espaces de travail modernes et confortables dans le foncier libre. Il est important d’avoir une offre pour les entreprises qui quitteront au fur et à masure de leur développement Bastide rouge, de façon à les fidéliser sur le territoire », note Michel Tani.
Les 35 formations du campus Bastide rouge de l’université Côte d’Azur (UCA) sont quant à elles hébergées gracieusement. Il faut dire que le développement de formations venant irriguer les entreprises implantées localement et la fertilisation croisée entre start-up, étudiants et professeurs font partie intégrante du logiciel de « Cannes on air ». Les parties communes de restauration ou d’espaces conviviaux engagent d’ailleurs aux échanges entre enseignants, étudiants et professionnels.
« Aujourd’hui les universités sont financées par projets, ce qui suppose de travailler avec des partenaires institutionnels et privés. Si nous avons la responsabilité de développer des formations en cohérence avec le développement de la filière industries créatives et culturelles, les collectivités territoriales nous donnent accès à de grandes entreprises. Nous avons par exemple monté avec la ville de Cannes et le groupe Banijay une chaire Content Creatives Incubator », explique Serge Milan, responsable de la pédagogie sur le campus cannois de l’UCA.
Si le territoire semble fourmiller de jeunes pousses créatives, l’enjeu sera à l’avenir de retenir les start-up qui ont grandi sous son aile et pourraient céder à l’appel du pied des investisseurs essentiellement parisiens qui font tourner le secteur, et les engagent déjà régulièrement à se rapprocher de la capitale.
Une gestion en régie ambitieuse
L’agglomération a fait le choix de gérer en régie le campus, l’hébergement des entreprises et la location des espaces de travail et plateaux techniques...
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