En proie à des difficultés économiques structurelles, de nombreux orchestres permanents français tentent de rééquilibrer leurs comptes, jusqu’à questionner leur effectif de musiciens. Un document ministériel évoque même de passer à 80 musiciens.
Les musiciens payeront-ils les pots cassés des difficultés financières qui pèsent sur leurs orchestres ? C’est une question qui se pose quand on regarde la dernière « mission de diagnostic » du ministère de la Culture ciblant l’Orchestre national de Lille (ONL), en raison d’un déficit budgétaire projeté à 1,5 million d’euros en 2027. Ce document, purement prescriptif, expose un certain nombre de préconisations à la direction de l’institution. Parmi elles, le rapport suggère que « l’effectif doit raisonnablement être revu à la baisse, en l’absence d’une augmentation significative des subventions », passant de 99 à 80 musiciens d’ici à 2026. Dominique Muller, délégué à la musique de la Direction générale de la création artistique (DGCA) du ministère de la Culture, rappelle que cette situation budgétaire n’est pas spécifique à l’institution lilloise. « Comme beaucoup de structures artistiques permanentes, l’ONL se trouve confronté à un effet bien connu dans le spectacle vivant : une relative stabilité, voire une baisse des subventions, alors que les coûts de fonctionnement (masse salariale, énergie, transport, etc.) augmentent sensiblement. »
D’après Philippe Fanjas, directeur de l’Association française des orchestres (AFO), le risque de réduction des effectifs est réel. « La question ne porte pas que sur les grands effectifs d’orchestre, elle porte sur les effectifs permanents d’un grand nombre de formations instrumentales, alerte-t-il. En période de difficultés budgétaires majeures, la réponse la plus immédiate des partenaires publics est souvent la réduction de la masse salariale, même s’il faut nuancer selon les territoires. »
Effectifs officiels stables
Pour le moment, les effectifs officiels restent relativement stables : entre 1992 et 2020, on observe une légère baisse de 3,6 % des effectifs théoriques des orchestres permanents. En revanche, le taux de postes laissés vacants a presque doublé sur la même période, passant de 4 à 8 %. « Nous constatons qu’il y a des recrutements différés dans la quasi-totalité des orchestres pour des raisons budgétaires, observe Philippe Fanjas, sans que cela affecte pour l’instant l’effectif officiel de l’orchestre. »
Soumis à des contraintes budgétaires, l’ONL n’échappe pas à la règle avec huit postes de musiciens gelés ces dernières années. Pour autant, sa directrice intérimaire Nathalie Van Vliet affirme qu’une réduction définitive de l’effectif « n’est pas travaillée actuellement », mais celle-ci « va dépendre de l’orientation du nouveau directeur général et des différents partenaires », à savoir la Ville, l’Intercommunalité, la Région et l’État, qui sont les principaux financeurs de l’orchestre.
Le LSO comme modèle
En raison de ces postes vacants, certains programmes à l’effectif important sont exclus du répertoire de l’orchestre lillois. « Nous ne pourrions plus jouer une intégrale des symphonies de Mahler comme en 2019-2020 », déplore Christelle Rimbert, altiste à l’ONL et membre du conseil syndical du SNAM-CGT Nord-Pas-de-Calais. Néanmoins, la plupart des pièces orchestrales, à Lille et ailleurs, ne requièrent pas un effectif de 99 musiciens. « Les séries de concerts faisant appel à un effectif dépassant les 90 musiciens ne constituent au maximum qu’un tiers des programmes de l’orchestre », relève la DGCA dans la mission de diagnostic, qui justifie la réduction d’effectif en s’inspirant du fonctionnement du London Symphony Orchestra et...
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