
Malgré les craintes que suscite son utilisation dans le domaine artistique, l’intelligence artificielle peut être, comme dans les sciences et l’industrie, une source passionnante de nouveaux problèmes et de défis scientifiques, affirment Jean Ponce et Isabelle Ryl, dans leur Carte blanche au « Monde ».
L’incroyable capacité de l’IA générative à produire des textes et des images à la fois complexes et plausibles a très tôt inquiété les métiers de la création : l’IA est, en effet, tout à fait capable de produire ce qui peut passer, aux yeux d’un profane en tout cas, pour l’original d’un poème, d’un script ou d’une lithographie. Ces craintes ont déjà mené aux premières négociations entre diverses branches professionnelles des métiers de la création, aboutissant, par exemple, à l’accord conclu entre les scénaristes et les grands studios hollywoodiens garantissant un seuil minimal de « participation humaine » aux productions.
Elles ont également orienté le débat vers la question du respect des droits d’auteur concernant les millions d’œuvres utilisées pour entraîner les modèles de l’IA générative, d’autant plus qu’il est impossible de quantifier la différence entre les « créations » de celle-ci et leur « inspiration ». La question est vieille comme le monde, mais l’usage « industriel » des sources en IA générative pose clairement la question de la rétribution de leurs auteurs.
L’impact sur les arts plastiques de l’invention de la perspective ou, plus près de nous, de la photographie et du cinéma, n’est qu’une illustration parmi tant d’autres des relations anciennes entre sciences, technologie et création artistique. En témoigne également l’exposition « Le Monde selon l’IA » qui se tient en ce moment au Jeu de paume, où des artistes exploitent ou détournent d’ailleurs déjà les capacités de l’IA générative dans leur propre travail. La vision artificielle est quant à elle utilisée depuis une vingtaine d’années au cinéma, que ce soit pour « virtualiser » en trois dimensions des éléments de décor bien réels ou pour capturer les expressions d’acteurs afin d’animer de manière réaliste leurs avatars numériques. Un des défis dans ce cas est d’ailleurs d’impliquer le technicien, voire l’artiste dans le processus de décision normalement totalement automatique de l’IA pour assurer les résultats « parfaits » attendus par les spectateurs.
Nouvelles expressions de créativité
C’est aujourd’hui la chaîne entière de production qui va être affectée, de la conception des story-boards utilisés en préproduction au montage final. L’IA générative commence aussi à percer dans les mondes de l’architecture et de la mode, où il faut de surcroît prendre en compte des exigences « fonctionnelles » comme faire passer des canalisations dans...
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