Système D, innovations, PGE, chômage partiel, mécénat, subventions… les opérateurs privés ont déployé l'artillerie pour faire face au Covid-19. Tous en revanche maintiennent leurs projets de développement.
Mauvaise année 2020 mais la casse a été évitée grâce à un été réussi, en régions plus que dans la capitale. Telle est la photographie de 2020 commune à la plupart des acteurs culturels privés opérant des musées ou des lieux patrimoniaux.
C'est le cas de la société Kléber Rossillon, qui exploite en France deux sites en propriété, les jardins de Marqueyssac en Dordogne et le château de Castelnaud en Périgord, et neuf autres en délégation de service public ou avec un bail emphytéotique, dont la grotte Chauvet 2 en Ardèche - le tout représentant habituellement 1,6 million de visiteurs et 22 millions d'euros de chiffre d'affaires. « En 2020, la perte de fréquentation est de 40 %, mais avec un recul de 25 % à 65 %, selon qu'on est en milieu rural ou urbain. Cela a été catastrophique pour le musée de Montmartre sans les parisiens partis se mettre au vert, alors que nos lieux patrimoniaux en Dordogne, en Ardèche et en Auvergne, ont connu une très bonne saison estivale », explique Geneviève Rossillon, présidente de cette entreprise qui compte 150 salariés permanents.
Chômage partiel, moindre recours aux saisonniers, soutien des collectivités délégantes, PGE, autant de leviers activés. « Nous avons obtenu plusieurs annulations de redevances ; la Ville de Paris nous a même versé une subvention pour le musée Montmartre », se félicite la dirigeante.
Souplesse des délégants
Même souplesse constatée par Bruno Monnier, président de Culturespaces , une filiale d'Engie qui exploite 11 espaces, centres d'art numérique, musées et monuments, dont la fréquentation a chuté de moitié par rapport aux 4,5 millions de visiteurs de 2019, le chiffre d'affaires tombant à 40 millions. Si le fondateur de Culturespaces n'a pas demandé de PGE, c'est grâce aux bonnes années engrangées précédemment. En revanche, il a mis 80 % de ses 350 permanents au chômage partiel.
« Pendant les périodes d'ouverture, heureusement, la fréquentation a été au rendez-vous. A Bordeaux, notre Bassin des Lumières inauguré en juin a enregistré 100.000 visiteurs par mois jusqu'à la fermeture forcée en octobre », explique-t-il, en colère toutefois de ne pouvoir exploiter en ce moment ces vastes sites à ciel ouvert, les arènes de Nîmes et le théâtre antique d'Orange.
Incompréhension également pour Alexandre de Vogüe, qui dirige le domaine de Vaux-le-Vicomte avec ses frères. Avec l'accord du préfet de Seine-et-Marne, ses jardins, spécialement illuminés et animés, sont restés ouverts à Noël, avec une jauge autorisée jusqu'à 3.000 personnes, souvent atteinte. « Il y a une attente du public pour ces parenthèses permettent d'échapper à la sinistrose et nous en maîtrisons parfaitement les flux », observe-t-il.
4.000 heures de bénévolat
Alors que Vaux-le-Vicomte a accueilli 319.000 visiteurs (dont 25 % d'étrangers) et réalisé 8,5 millions de chiffre d'affaires en 2019, l'activité a chuté de 65 % en 2020. La famille propriétaire a « tenu » grâce à un PGE de 1,5 million d'euros, au chômage partiel de 60 % de ses 75 salariés, aux subventions plutôt revues à la hausse du département et de la Région Ile-de-France et aux 600.000 euros de mécénat recueilli. « Et nous avons un solide réseau d'amis fidèles du domaine, qui nous ont apporté 4.000 heures de bénévolat », note le châtelain.
La fréquentation du Gouffre de Padirac n'avait cessé elle aussi d'augmenter, jusqu'à atteindre 503.000 visiteurs en 2019 avant que le Covid-19 ne la fasse tomber à 284.000 personnes, son score de 1970. Laetitia de Ménibus-Gravier, PDG de la société d'exploitation de la seule grotte privée de France, est parvenue néanmoins à limiter la baisse du chiffre d'affaires à 35,5 %, soit à 4,9 millions d'euros. La billetterie, basculée 100 % en ligne, a permis de réguler les flux de visiteurs, d'ajuster la masse salariale à la fréquentation et d'éviter des temps d'attente en caisse. La dirigeante entend toujours détrôner le leader européen, une grotte slovène qui accueille 700.000 visiteurs, travaillant sur les infrastructures d'accueil avec la région Occitanie pour, à terme, recevoir 800.000 explorateurs.
Pérenniser les innovations
Car la crise a aussi pérennisé des innovations et accéléré les projets de développement. Chez Kleber Rossillon, les visites individuelles de la Grotte Chauvet 2 via une application sur smartphone vont...
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