Trois chorégraphes et danseurs, d’univers éloignés, nous plongent dans les coulisses de leurs créations à destination des jeunes et de leurs réflexions.
Un spectacle pour enfant est-il condamné à être la version simplifiée d’un spectacle pour adulte ? Du ballet féerique à l’abstraction plastique, en passant par la danse verbeuse, des projets ambitieux prouvent que les jeunes sont bien loin d’être des spectateurs au rabais.
Dans une salle du Théâtre du Châtelet, à deux semaines des représentations, les seize interprètes d’Il était une fois Casse-Noisette soignent leurs pirouettes et leurs portés. Contrairement aux apparences, ce ballet d’un académisme pointu est destiné… à un jeune public. Impulsée par Karl Paquette, danseur étoile à l’Opéra de Paris, chorégraphiée par son confrère maître de ballet Fabrice Bourgeois, cette transposition de l’œuvre de Marius Petipa est le petit frère de Mon premier Lac des cygnes (2019), qui remporta un vif succès.
Encore une fois, le credo des acolytes était de rendre accessible un ballet culte : « Casse-Noisette est un ballet parfait pour les enfants, précise Karl Paquette, qui y interprète plusieurs personnages. Noël, les cadeaux, les rêves et les cauchemars, ça leur parle ! Nous traitons le sujet avec humour, avec des costumes qui ressemblent à des pâtisseries et une narration qui les guide à travers les moments de danse. Mais nous n’avons pas beaucoup changé ce ballet, juste resserré l’action en deux fois quarante minutes, pour se prêter à l’attention des enfants. J’insiste sur le fait qu’il s’agit d’une version réduite, mais pas simplifiée. La danse est la même que celle d’un spectacle pour les adultes. Je tenais absolument à présenter le meilleur de la danse classique. »
"Les enfants sentent quand c’est faux, ce qui requiert de la part de l’interprète une présence et une authenticité sans faille, ainsi que justesse et précision dans ses intentions."
Marion Lévy, chorégraphe
La chorégraphe Marion Lévy, ancienne interprète d’Anne Teresa De Keersmaeker, a aussi fait le pari de l’exigence, mais avec minimalisme. Avec Et si tu danses, elle réinvente (en collaboration avec l’autrice Mariette Navarro) le conte du Petit Poucet pour le comédien-danseur Stanislas Siwiorek et quelques cailloux. Devenu grand et ramasseur de pierres, Poucet invoque ses souvenirs d’enfance, à coups de mimes et d’onomatopées, devant un public tantôt hilare, tantôt stupéfait.
Et la chorégraphe est restée fidèle à sa recherche artistique : « Dans toutes mes pièces, je cherche à créer un troisième langage poétique, qui émerge de la rencontre du texte et du corps. Je n’ai rien changé pour jouer devant un jeune public ; je travaille avec la même exigence qu’avec les adultes, voire davantage. Les enfants sentent quand c’est faux, ce qui requiert de la part de l’interprète une présence et une authenticité sans faille, ainsi que justesse et précision dans ses intentions. Nous avons essayé de nous mettre à la place des enfants, de réfléchir à ce dont ils avaient besoin à leur stade de développement [ici à partir de 4 ans, ndlr]. Le spectacle est très interactif, les jeunes spectateurs répondent et dansent avec Stanislas. Leurs réactions n’ont rien à voir avec celle...
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