Le tribunal administratif de Lyon a rendu, le 14 octobre 2025, un jugement salué par les acteurs culturels : la région Auvergne-Rhône-Alpes est condamnée à attribuer une somme de 149 000 euros au Théâtre Nouvelle Génération de Lyon pour l'indemniser d'une subvention non versée. A l'origine de ce refus : une prise de position politique qui avait déplu au président d'alors, Laurent Wauquiez.
Dans un jugement du 14 octobre 2025, le tribunal administratif de Lyon a eu à trancher une nouvelle affaire de subvention refusée par la région Auvergne-Rhône-Alpes, cette fois-ci destinée non pas à des communes, comme dans les affaires du 14 octobre et du 14 avril 2025, mais au Théâtre Nouvelle Génération (TNG).
Que s’est-il passé ? Par une convention triennale signée en 2022, la région Auvergne-Rhône-Alpes s’était engagée à accompagner financièrement le TNG sur la période 2022-2024, sous conditions : l’inscription des crédits dans les budgets de la collectivité et le dépôt par le TNG d’une demande de subvention annuelle avant la fin de l’année précédente.
Comme le rappelle le juge, « l’attribution d’une subvention par une personne publique crée des droits au profit de son bénéficiaire. Toutefois, de tels droits ne sont ainsi créés que dans la mesure où le bénéficiaire de la subvention respecte les conditions mises à son octroi, que ces conditions découlent des normes qui la régissent, qu’elles aient été fixées par la personne publique dans sa décision d’octroi, qu’elles aient fait l’objet d’une convention signée avec le bénéficiaire, ou encore qu’elles découlent implicitement mais nécessairement de l’objet même de la subvention ».
Prises de positions publiques
Or, ici, le juge relève que les conditions étaient bien remplies : la région n’avait pas de difficultés financières particulières et le TNG avait bien déposé dans les temps un dossier de demande de subvention au titre de 2023. Plus encore, l’accusé de réception délivré au demandeur n’évoquait aucune irrégularité ou incomplétude du dossier de demande.
Mais alors pour quel motif cette subvention n’a-t-elle pas été versée ? La vice-présidente déléguée à la culture de la région a affirmé que « l’exécutif de la région avait estimé que le directeur du TNG, par ses prises de position publiques, devait être regardé comme ayant manifesté l’intention de ne plus travailler avec la régio
Le président (LR) de la région, Laurent Wauquiez, entendait ainsi répliquer aux critiques du metteur en scène Joris Mathieu sur sa politique culturelle et à l’accusation de faire régner un « climat de terreur ». Des propos tenus dans des tribunes au vitriol publiées sur le site du Syndeac le 18 avril 2023 et celui de l’hebdomadaire Télérama deux jours plus tard.
Une raison valable ? Pas pour le juge, qui observe que le TNG n’avait pas résilié la convention pluriannuelle de financement qui le liait à la collectivité, et que la région n’était pas fondée à considérer que le théâtre n’avait pas respecté ses engagements en matière de communication. Ainsi, la région était tenue par son engagement à verser une subvention au TNG pour la période 2022-2024, et son refus de l’accorder constitue un manquement à son engagement.
Le TNG est alors fondé à obtenir réparation des préjudices qu’il a subis et qui sont en lien direct et certain avec ce manquement. Comme la convention laisse le montant de la subvention à la discrétion de la région, le juge estime que celui qui aurait été alloué en 2023 n’aurait pas été inférieur à celui de 2022. Ainsi, la région est condamnée à verser au TNG la somme de 149 000 euros, qui correspond à la subvention de 2022.
« Ce jugement affirme que les conventions pluriannuelles d’objectifs (COP) valent engagement de subventionnement — sans préjuger du montant de la subvention annuelle — si les obligations des contractants sont respectées, analyse Vincent Roche Lecca, président de Scène Ensemble, syndicat du secteur public du spectacle vivant. La reconnaissance de ces COP est importante car nous avons besoin de nous projeter sur le long terme ».
Liberté d’expression et indépendance des institutions culturelles
Cette décision « constitue un signal fort en faveur de la liberté d’expression et de l’indépendance des institutions culturelles », souligne le Syndicat national des entreprises artistiques et culturelles (Syndeac), dans son « édito » en ligne du 29 octobre, cosigné par ses coprésidents : Joris Mathieu, ex-directeur du TNG, devenu directeur de la compagnie Haut et cour, et Claire Guièze, directrice adjointe du Théâtre de Dijon-Bourgogne.
Selon les deux signataires, ce jugement...
Lire la suite sur lagazettedescommunes.com





