
La 36e cérémonie des Molières se déroule ce lundi 28 avril – retransmission en direct à 21 h 10 sur France 3. Jean-Marc Dumontet, figure majeure du théâtre privé hexagonal, propriétaire de plusieurs salles de théâtre et producteur de nombreux spectacles, préside l’association des Molières depuis douze années déjà. Pour « Marianne », il revient sur sa volonté de voir une nouvelle forme de théâtre engagé prendre de l'ampleur en France.
La cérémonie des Molières couronnera, ce lundi 28 avril, quelques-unes des meilleures réussites du théâtre français pour l'année écoulée. À la tête de l'organisation : Jean-Marc Dumontet, 59 ans, président de l'association des Molières. Propriétaire (notamment) du Théâtre Libre et du Point-Virgule à Paris, il a produit de nombreux humoristes, de Nicolas Canteloup à Alex Lutz, mais aussi des pièces de théâtre – comme récemment, Le Cercle des poètes disparus. En 2017, il a créé un nouveau rendez-vous engagé : le festival Paroles Citoyennes, qui a pour ambition de « construire des ponts entre la création artistique et les grands enjeux qui traversent notre société ».
Marianne : Vous êtes à la fois organisateur de la rituelle soirée des Molières et producteur de spectacles tout au long de l'année. Cette double casquette est-elle parfois un peu compliquée à porter ?
Jean-Marc Dumontet : C’est tout sauf antinomique ! C’est tout à fait normal qu’à la tête des Molières il y ait des gens du monde du théâtre. Mais bien sûr, les pièces que je défends sont soumises à la même rigueur que les autres. Nous sommes un panel de 3 300 professionnels du monde du théâtre à nous exprimer au moment des votes, et comme tout le monde, je n’ai qu’une voix. Il n’y a donc aucun conflit d’intérêts possible.
« C'est important de célébrer la chance inestimable qu’on a de faire ce métier… »
Quand vous êtes responsable des Molières, vous avez d'abord le devoir que la cérémonie se passe bien, c’est la vitrine de toute une profession. Il faut que la soirée soit la plus harmonieuse possible, et que tout le monde y trouve son compte. C’est là où se concentre le poids ou l'influence que je peux avoir sur le cours des choses.
Sous quels signes aimeriez-vous que se déroule la cérémonie 2025 ?
Quelle que soit la complexité des moments que nous vivons, j’ai toujours envie que ce soit un moment joyeux, festif. C’est une question d’image, et c’est crucial parce que notre métier repose sur le désir. C’est ça qui attire les spectateurs : le désir de se cultiver, de se divertir, de s’élever. Dans la salle aussi, je souhaite que les gens soient heureux de partager ce moment. D’abord parce que c’est l’occasion de brasser théâtre public et théâtre privé, c’est un temps privilégié d’interconnaissance. Et puis, parce que c’est important de célébrer la chance inestimable qu’on a de faire ce métier.
Selon vous, une tendance particulière s'est-elle dégagée des productions de l'année 2024 ? Un ton, des thématiques récurrentes ?
En France, on a la chance d’avoir des créations que je qualifierais d'effervescentes, preuve et signe que notre pays continue à encourager la création. Donc, il n’y a pas vraiment de tendance, non, mais j’observe incontestablement une richesse. Ce qui est stimulant, c’est qu’il y ait des valeurs sûres et des révélations. Les Molières oscillent en permanence entre consécration d’acteurs évidents, remarquables, et prime à de nouveaux entrants. C’est un bel équilibre.
Dans votre histoire personnelle, comment a émergé ce qu'on peut appeler la fibre théâtrale ? Quel a été le déclic ?
Ça remonte à il y a plus de trente ans, avec la pièce La Java des mémoires, dans un théâtre du Lot-et-Garonne. J’ai été bouleversé par cette pièce, donc à la fin, je suis allé voir l’équipe et je leur ai dit : « Je ne sais pas encore comment faire, mais je voudrais vous aider… » C’est comme ça que je suis tombé dedans, alors que ce n’était pas mon métier. On a tous besoin d’adrénaline, c’est ce que ça m’a apporté. En plus de beaucoup de satisfaction intellectuelle…
« Dans le monde actuel, on entend beaucoup moins les gens raisonnables, qui ne se placent pas dans la polémique et le combat manichéen… »
Vous savez, c’est extrêmement émouvant de toucher le public, et que votre travail soit reconnu. Surtout lorsqu’on a vu un projet se densifier sur un temps long. Dans ce métier, on vit des aventures qui sont toujours particulières, rien ne se passe jamais tout à fait comme prévu.
C'est précisément pour cette dimension intellectuelles que vous avez créé le festival Paroles Citoyennes, qui fait dialoguer un texte, un acteur et des personnes engagées ?
Ça répond certainement à mon goût de la démultiplication, de vivre plein d’aventures, notamment intellectuelles. Au départ, il y a surtout un besoin d'engagement. Les gens qui sont sans cesse dans le conflit et qui vocifèrent ont une caisse de résonance trop forte, à cause des réseaux sociaux mais surtout des chaînes d’info en continu.
Dans le monde actuel, on entend beaucoup moins les gens raisonnables, qui ne se placent pas dans la polémique et le combat manichéen, mais qui posent des choses. Le spectacle de Charles Berling sur Calek Perechodnik, témoin des...
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