
Plus de 200 millions d’euros. C’est le montant de la réduction du budget de la culture dans le projet de loi de finances de 2026 présenté par le gouvernement. Patrimoine, création artistique, Pass culture, audiovisuel… aucun secteur n’est épargné.
«On a sauvé ce qu’on a pu. » C’est le constat un rien désabusé fait au ministère de la Culture quand le projet de loi de finances 2026 a été rendu public par Matignon, mardi 14 octobre. L’addition est, il est vrai, salée. C’est même plutôt de soustractions dont il faut parler, tant toutes les grandes directions du ministère sont mises à contribution par les baisses décrétées par le gouvernement.
Au global, les crédits de la Rue de Valois (hors audiovisuel) s’élèvent en 2026 à 4,2 milliards d’euros. Un recul de 216 millions par rapport au projet de loi de finances 2025 et un retour, à peu de chose près, à leur niveau de 2023. Pour la première fois depuis plus d’une décennie, le soutien du ministère à la création artistique n’est pas intégralement préservé. Avec une enveloppe très légèrement supérieure à 1 milliard d’euros (1,009), son budget est en recul de 34 millions d’euros. Dans la réalité, il l’est même de plus de 40 millions, du fait d’un transfert de crédit au Mobilier national. Cette baisse inédite n’est pas sans conséquence. Pour y faire face, le ministère est contraint de réduire les financements des directions régionales des affaires culturelles (Drac) et de limiter ainsi sa capacité de soutien aux acteurs culturels sur tout le territoire. Une première, là aussi, depuis longtemps. Les crédits affectés à de grands établissements comme l’Opéra de Paris, la Philharmonie et sans doute plusieurs autres devraient aussi légèrement baisser.
Heureusement, le ministère poursuit et augmente les moyens de la seule véritable politique un tant soit peu structurante qu’il ait initiée ces dernières années : le plan « Mieux produire, mieux diffuser », destiné à pousser le secteur du spectacle vivant à produire moins de spectacles tout en mutualisant les coûts entre plusieurs établissements et en faisant en sorte qu’ils tournent plus longtemps. Doté de 9 millions d’euros les deux premières années de sa mise en place, ce dispositif, qui semble faire ses preuves, devrait bénéficier de 15 millions d’euros en 2026.
“L’urgence patrimoniale” a du plomb dans l’aile
Le patrimoine, jusqu’ici préservé par Rachida Dati depuis son entrée Rue de Valois, fait cette fois les frais d’une coupe importante. Il reste le premier budget du ministère avec un montant de 1,143 milliard d’euros, mais ses crédits sont en baisse de 58 millions d’euros par rapport au projet de loi de finances 2025. Un recul pour le moins inattendu venant d’une ministre qui le défend bec et ongles au point d’avoir décrété « l’urgence patrimoniale » dans l’une de ses interventions, en novembre 2024, au Sénat. Rachida Dati avait rappelé à cette occasion que la France comptait quarante-cinq mille monuments historiques dont « 20 % en mauvais état et 5 % en péril, soit plus de deux mille qui risqueraient de disparaître dans les prochains mois ». Elle avait à l’époque réussi à obtenir une rallonge de 300 millions d’euros, que le gouvernement avait finalement ramenée à 47 millions quelques semaines plus tard.
La lente dégringolade du Pass culture
Autre ligne du ministère en forte baisse cette fois pour la deuxième année consécutive, celle intitulée « La transmission des savoirs et démocratisation de la culture », qui mêle les actions facilitant l’accès des jeunes à la culture, l’enseignement artistique dans le supérieur ou encore la promotion de la langue française. Dotée de 723 millions d’euros en 2026, elle est en recul de 37 millions par rapport à cette année et de 100 millions d’euros en deux ans. Cette diminution importante est largement imputable à la baisse des crédits du Pass culture. Dans le projet de loi de finances 2025, il avait été budgétisé à 210 millions d’euros, avant d’être ramené à 170 millions lors du débat parlementaire. Dans le budget 2026, il passe à 127,5 millions d’euros. Une baisse qui traduit les importantes modifications dont a fait l’objet ce dispositif fortement critiqué par de nombreux acteurs culturels qui lui reprochent son côté purement consumériste. Parmi les changements apportés, le montant offert aux jeunes de 18 ans a été divisé par deux passant de 300 à 150 euros. Les 50 euros attribués aux 15 et 16 ans (respectivement 20 euros et 30 euros) disparaissaient, alors que ceux attribués aux jeunes de 17 ans passaient de 30 à 50 euros.
Tant pis pour les nouveaux investissements
Face à ce mur de baisses, le ministère de la Culture n’a d’autres choix que d’en faire de mauvais. Réduire sensiblement la portée de son action sur tout le territoire, baisser les subventions aux établissements les plus à même de les absorber, et surtout annuler ou différer des investissements. En langage technocratique, on préfère parler d’un « lissage des investissements dans le temps », et c’est ce que fait le ministère dans ce projet de budget. Il peut encore financer certains travaux prévus de longue date comme le Théâtre national de la danse de Chaillot ou le Palais de Tokyo, à Paris, mais n’a plus les moyens de programmer de...
Lire la suite sur telerama.fr