Les propos controversés de Rachida Dati, envisageant la fermeture de plusieurs d’entre elles, l’ont confirmé. De Chalon à Toulouse, les écoles d’art et de design, dépendantes de collectivités financièrement exsangues et délaissées par l’État, sont en danger.
Assemblée nationale, mardi 19 mars. Devant les députés de la commission des affaires culturelles, Rachida Dati se dit prête à « fermer certaines écoles » d’art et de design « déconnectées de la réalité ». Chez les étudiants et les enseignants, c’est la consternation. La veille, leurs syndicats étaient reçus par le cabinet de la ministre. La rencontre s’était plutôt bien passée, après un long silence et une année scolaire 2022-2023 marquée par les crises et les grèves. Mais après la sortie de Rachida Dati à l’Assemblée, le syndicat étudiant Le Massicot envisage « de fortes mobilisations ». Quelques jours après, la ministre tente de corriger le tir en déclarant son attachement au service public. Trop tard. L’inter-organisations Écoles d’art et design en lutte avertit aussitôt de sa « vigilance ».
La menace de fermeture, l’École média art (ÉMA), à Chalon-sur-Saône, la connaît déjà. Dans cette ville où la ministre a passé son enfance, l’État vient de retirer l’ÉMA de Parcoursup, la plateforme d’inscription en ligne pour l’enseignement supérieur. L’école ne peut plus accueillir de candidats en première année pour 2024. Le ministère de la Culture et le président du Grand Chalon, Sébastien Martin, de droite tendance Xavier Bertrand, se renvoient la responsabilité d’une situation très confuse.
Enseignants et étudiants, eux, ont appris la nouvelle dans la presse locale. Depuis, le cabinet de Sébastien Martin assure vouloir « ne laisser personne sur la touche » en attendant qu’une nouvelle « formation artistique » se mette un jour en place. Et les cours du soir pour amateurs continueront. Mais l’association des étudiants, le Club-Made, n’admet pas cette triste fin annoncée, alors que ses représentants se disent « très bien accompagnés » par l’équipe pédagogique.
L’École supérieure d’art et de design de Valenciennes subit le même sort. Elle a été écartée de Parcoursup en 2023 faute de financement local : depuis près de dix ans, le maire Horizons et président de la communauté d’agglomération, Laurent Degallaix, rabotait les crédits. Le précédent directeur ayant démissionné, une directrice provisoire gère les affaires courantes en attendant une probable fermeture. Et avant Valenciennes et Chalon, l’école de Rueil-Malmaison avait déjà baissé le rideau en 2011, suivie par celle de Perpignan en 2016.
Des déficits parfois abyssaux
Les trente-quatre écoles publiques d’art et de design territoriales délivrent en trois ou cinq ans des diplômes nationaux, mais leur budget dépend à 87 % des collectivités locales. Elles ne luttent pas à armes égales face aux dix nationales (Beaux-Arts de Paris ou de Nancy, École nationale supérieure de création industrielle, Arts-Déco de Paris…), qui forment aux mêmes diplômes, mais sont financées par l’État. Or, depuis 2022, les territoriales subissent de plein fouet l’inflation — compensée par l’État dans les écoles nationales.
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