Le producteur Matthieu Drouot, dont les artistes participent à 30 festivals cet été, parmi lesquels 25 en juillet, ne s'en cache pas : « Les résultats en termes de fréquentation ont été mitigés, avec des remplissages à la moitié ou aux deux tiers de la jauge, mais nous sommes contents de jouer. » Ainsi aux Nuits de Fourvière, la seule soirée complète pour ses artistes a été celle de Mélody Gardot, « alors qu'habituellement ce festival se remplit très rapidement », dit-il.
Idem aux Francofolies de la Rochelle, qui n'ont pas fait le plein chaque soir, ou aux Vieilles Charrues, à Carhaix, qui ont vendu 30.000 places sur 50.000 : l'événement breton s'était pourtant limité à dix soirées de concerts, au lieu de quatre jours avec de multiples scènes, resserrant son budget de 18 à 3,5 millions d'euros pour limiter les risques. Le Brive Festival, qui a aussi mis en oeuvre un « plan B », ne s'en est pas trop mal sorti. « Sur quatre soirées de chanson française, nous avons reçu entre 3.500 et 4.500 festivaliers pour une jauge à 5.000, et les packages VIP ont bien marché », confie Simon Gillham, président de Vivendi Village.
Annulation des blockbusters
Malgré l'annulation de blockbusters (Hellfest, Eurockéennes, Rock en Seine, Lollapalooza, Main Square…), réduisant de fait la concurrence, l'uniformisation des affiches et l'absence de stars internationales sur les événements maintenus ont nui à la fréquentation. Ainsi Ibrahim Maalouf ou Thomas Dutronc font une trentaine de dates cet été.
Pour Matthieu Drouot, le pass sanitaire constitue aussi un frein aux réservations. Ce que confirme Jean-Louis Guilhaumon, maire de Marciac (Gers), fondateur du festival de jazz qui tient sa 43e édition jusqu'au 4 août, sur douze jours au lieu de dix-huit. Il a eu beau installer un centre de vaccination et de test à deux pas du chapiteau, « par effort citoyen », il enregistre un peu de déperdition pour cette manifestation habituellement fréquentée à 55 % par un public venu du Sud-Ouest, 10 % de l'Ile-de-France, 30 % des autres régions et 5 % de l'étranger.
Pression médiatique obsessionnelle
« Les gens ont besoin d'être rassurés car les contraintes ne sont pas si lourdes, l'atmosphère reste conviviale, mais c'est l'idée qu'ils s'en font, avec la pression d'une actualité médiatique obsessionnelle », explique Jean-Louis Guilhaumon.
C'est pour lui « l'édition de tous les dangers, car les règles du jeu n'ont cessé d'évoluer, et de nous prendre à contre-pied ». Ainsi, quand il a pris la décision, fin avril, de maintenir le festival, la jauge autorisée était fixée à 35 % jusqu'au 9 juin, puis à 65 % ensuite. Pour respecter la distanciation sociale, il a alors choisi de louer un chapiteau de 6.700 places au lieu de 5.500.
« Finalement, la jauge autorisée est revenue à 100 % mais le pass sanitaire est entre-temps venu refroidir les ardeurs. Les réservations, qui avaient très bien démarré après l'annonce de la programmation fin mai, se sont contractées depuis le 21 juillet », constate le premier magistrat de ce village de 1.250 habitants.
Tablant sur une sortie de la troisième vague, l'édile avait prévu des têtes d'affiche comme Lenny Kravitz. C'était sans compter le variant Delta. « On a été confrontés au report des tournées internationales et il a fallu trouver des artistes français et européens très rapidement », pointe-t-il.
« Le gouvernement ne se rend pas compte à quel point ces adaptations permanentes sont fatigantes nerveusement pour les professionnels qui doivent tout faire dans l'urgence. On arrive aux limites de l'exercice », considère Sébastien Perrier, en charge des partenariats du festival We Love Green, à Paris.
Tournées compliquées
Et du côté des artistes, ce sont aussi les plus motivés qui remontent sur scène car les tournées sont compliquées à organiser : « Ils doivent faire beaucoup d'allers-retours au lieu d'enchaîner les festivals, à cause des manifestations supprimées », déplore Matthieu Drouot. Des artistes qui ont parfois fait des efforts sur leurs cachets selon la jauge (mais réduit du même coup leurs équipes), ont invité des « guests » et accepté une promotion intense auprès des médias…
Le premier week-end de Jazz in Marciac, Robin McKelle suivie de...
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