
Opéras, orchestres, ensembles et conservatoires ont suivi ou organisé des formations pour prévenir les agissements sexistes et les violences sexuelles. Mais qu’apportent-elles réellement aux équipes et leur efficacité peut-elle être mesurée ?
À quelques jours de Noël, Angers-Nantes Opéra offre à ses équipes une demi-journée de formation pour prévenir les violences sexuelles et les agissements sexistes. Dans le grand hall, de petits groupes de salarié·es soufflent sur leur gobelet de café. On nous propose une eau chaude quand un homme, la petite cinquantaine, s’approche. « Quelle perte de temps ces formations, râle-t-il. Je ne vois pas l’intérêt de ce format qui nous infantilise, alors qu’une bonne brochure ferait le travail. »
Il est 14 heures, tout le monde se dirige vers la grande salle aux fauteuils rouges. L’assemblée se scinde : celles et ceux qui s’installent à l’avant semblent très intéressé·es par le sujet ; à l’arrière, on s’assoit avec nonchalance. Charlotte Gautier, formatrice à rEGALons-nous!, Amélie Paquereau et Mickaël Gouret, comédienne et comédien, décortiquent devant la trentaine d’agent·es et de vacataires – les équipes artistiques ont déjà eu leur session le matin – des situations de violence sexuelles ou des agissements sexistes.
Théâtre forum, petites saynètes et temps plus formel s’appuyant sur le droit du travail se succèdent pendant trois heures. La parole est permise, et au fur et à mesure, les langues se délient, les situations évoquées font réagir, même celles et ceux qui semblaient hermétiques au démarrage.
Au terme de l’après-midi, le directeur, Alain Surrans, se réjouit : « Il était très important pour nous que cette formation ait lieu. Nous découvrons l’attente sous-jacente qui existe et nous sommes moins démunis s’il se passe quelque chose. » Depuis sa prise de fonction en 2017, il recense quatre épisodes qui ont demandé son intervention.
Depuis 2021, le Centre national de la musique (CNM) conditionne ses aides à l’engagement des structures dans la prévention des violences sexistes et sexuelles (VSS). En 2022, le ministère de la culture lui emboîtait le pas. Au cœur de ces protocoles, comme un leitmotiv, la formule « Prévenir, agir, sanctionner ».
Pour recevoir les aides, les structures doivent donc s’engager via un formulaire à former aux fondamentaux en matière de VSS la personne représentante légale de la structure, à respecter le Code du travail, à former l’ensemble des équipes à la prévention des violences sexistes et sexuelles, à mettre en place un dispositif de prévention des risques, à créer un dispositif interne de signalement efficace, à traiter chaque signalement reçu et enfin à engager un suivi et une auto-évaluation des actions.
La notion de formation est centrale, notamment parce qu’elle pourrait permettre de s’en tenir au premier point : « prévenir ». « Conditionner les aides à cet engagement a permis de rendre les formations quasi obligatoires, note Anne-Lise Vinciguerra, formatrice et directrice de l’organisme La Petite. En trois ans, des milliers de personnes ont été formées. Je crois vraiment que cela va transformer le secteur. »
Pour les mettre en œuvre, les conservatoires, les écoles et les structures culturelles publiques s’appuient sur leurs fonds propres. Dans le secteur privé, après le CNM, c’est dorénavant l’organisme paritaire collecteur, l’Afdas majoritairement, qui finance.
Particulièrement propice
Depuis quelques années, les « affaires » sont révélées et soulignent que le monde culturel n’est pas épargné. Anne-Lise Vinciguerra est formelle : le secteur de la musique est particulièrement propice aux violences sexuelles et aux agissements sexistes.
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