Plus de 800 professionnels du cinéma, parmi lesquels Jacques Audiard, Valérie Donzelli, Pierre Niney, Léa Seydoux, dénoncent dans une tribune au « Monde » le gâchis, la violence et l’injustice que constitue la fermeture des salles obscures. Qu’attend-on exactement pour les rouvrir ?
Aujourd’hui, et depuis de très longs mois, les 5 913 écrans des 2 046 cinémas de France sont maintenus fermés au nom d’un principe de précaution sanitaire pourtant contredit par un avis du conseil scientifique du 26 octobre et par l’étude ComCor de l’Institut Pasteur du 10 décembre 2020.
Aujourd’hui, nous pourrons donc, encore et toujours, faire la queue pour aller acheter des baskets ou une glace, nous entasser dans les supermarchés ou prendre le train, même bondé, mais nous ne pourrons pas aller au cinéma. Ni au théâtre. Et cela malgré la mise en place d’un protocole sanitaire des plus stricts et des plus fiables dès le premier jour du déconfinement.
Au gré des chiffres, des variants, des politiques d’image, d’annonce, de culpabilisation ou d’intimidation, nous avons le sentiment d’être éradiqués. Et alors quoi ? On reste fermé un an, deux ans ? Pour toujours ?
L’avenir d’une profession hypothéqué
Monsieur le président, nous voudrions préciser une chose que l’opinion publique ne sait pas, mais que, bien plus grave, vous ne semblez pas savoir non plus : le cauchemar que vit l’industrie du cinéma, ses travailleurs et travailleuses, n’est pas tant celui de l’année 2020, certes extrêmement difficile, mais bel et bien celui des deux voire trois années à venir.
Chaque semaine de fermeture ajoute à la catastrophe en marche. C’est l’avenir d’une profession qui est hypothéqué, à mesure que les films terminés s’empilent chaque semaine sur les étagères des distributeurs. C’est le « tout plate-forme » qui s’installe dans les habitudes et dévalorise nos ambitions et nos droits.
C’est une filière industrielle économique forte de 340 000 emplois qui coule. C’est un monde de débats et d’idées qui s’appauvrit considérablement. Car le cinéma ne se préoccupe pas que du cinéma. Il se préoccupe de tout ce qui fait société, ouvre à la réflexion, à la discussion, amène la rencontre avec ce public qui nous manque à hurler. Et à qui l’on manque.
Quel gâchis.
Quelle violence.
Quelle injustice.
Votre gouvernement est en train de tuer le cinéma français
Combien de fois faudra-t-il répéter qu’aucun théâtre, lieu de culture ou salle de cinéma n’a été un foyer de contamination ? Combien de fois faudra-t-il répéter que nous ne sommes ni des troubadours égoïstes et déconnectés, ni des divas dans des tours d’ivoire, mais bel et bien des femmes et des hommes responsables, conscients de la gravité de la situation ?
Que le cinéma français est la troisième cinématographie la plus importante du monde, et que vous risquez de la faire s’effondrer en à peine un an. Monsieur le président, une étude allemande menée par l’Institut Hermann-Rietschel (Université de Berlin) et publiée le 19 février 2021 conclut que les salles de cinéma sont deux fois plus sûres que les supermarchés et trois fois plus sûres que les voyages en train. Lisez-la !
Votre silence et celui de votre...
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