
Alors que le secteur du spectacle vivant traverse une crise sans précédent, les organisations professionnelles, les artistes, les directrices et directeurs de lieux sur l’ensemble du territoire demandent au ministère de la Culture et à la DGCA une révision des critères d’aides pour les compagnies.
Nous, acteurs et actrices du paysage du spectacle vivant, tenons à alerter publiquement sur la situation catastrophique dans laquelle se trouvent aujourd’hui les équipes artistiques du spectacle vivant public. Nous demandons au ministère de la Culture une révision immédiate et significative des critères d’accès à l’aide au projet et au conventionnement pluriannuel.
Plus que jamais, dans un contexte de tensions sociales, économiques et politiques, le rôle du service public de l’art et de la culture est essentiel : faire société, cultiver le vivre ensemble, défendre des valeurs sociétales et favoriser la création d’œuvres d’art et de l’esprit qui enrichissent notre démocratie. Or, ces valeurs sont aujourd’hui gravement mises à mal.
Le secteur du spectacle vivant public est attaqué de toutes parts : financièrement bien sûr, avec des coupes budgétaires massives, et l’érosion permanente des soldes artistiques disponibles du fait de l’inflation, mais aussi idéologiquement, par une remise en cause profonde du sens même du service public de la culture.
Au niveau étatique, la politique d’aides publiques aux équipes artistiques est désormais hors-sol par rapport aux réalités du terrain et à la crise que connaît actuellement le secteur (cf. étude LAPAS 2024 qui faisait apparaître une baisse moyenne de la diffusion de 33% entre les saisons 23/24 et 24/25).
Depuis la réforme de 2022, les critères d’éligibilité aux aides du ministère sont devenus inatteignables pour une majorité de compagnies : 25 représentations sur 2 ans et 70 sur 3 ans pour la danse, 20 représentations sur 2 ans et 70 sur 3 ans pour la musique ou encore 50 représentations sur 2 ans et 90 sur 3 ans pour le théâtre dans deux régions minimum, 80 représentations pour le cirque, les arts de la rue et les DOM. Ce sont des objectifs très difficilement réalisables, surtout dans un contexte de raréfaction des moyens de production et de diffusion et l’apparition d’un nouveau critère concernant la co-réalisation.
Les dispositifs dérogatoires, censés offrir une certaine souplesse, ne relèvent plus aujourd’hui que de l’exception. Ils sont devenus une norme implicite, introduisant une véritable inégalité entre les équipes artistiques, en fonction du positionnement individuel de leur conseiller ou de la politique menée par la DRAC dont elles dépendent – des politiques qui peuvent varier du tout au tout selon les territoires. Il n’est pas acceptable que l’avenir des équipes artistiques et de leurs salarié·es dépendent de critères aussi opaques et variables.
Les conséquences sont déjà visibles et alarmantes : pour l’année 2025, diminution de 22 % des demandes de convention théâtre et arts associés pour la DRAC Île-de-France. De nombreuses équipes renoncent d’avance, par autocensure, à formuler une demande, conscientes qu’elles ne rempliront pas les critères exigés. C’est un plan de licenciement massif, à la fois visible et invisible, qui est en train de se mettre en place dans un silence assourdissant.
Par ailleurs, les politiques publiques actuelles semblent vouloir remplacer le soutien structurant du ministère par une logique de guichet ou de marché. Certaines aides, comme le Fonds de Soutien à la production de la DGCA, sont attribuées sans critères lisibles.
Enfin, le Fonpeps insuffisamment doté en 2025, est mis en cause dans son volume budgétaire pour 2026 alors même qu’il a pris son rythme de croisière.
Nous assistons de façon accélérée à l’immense précarisation des artistes et techniciens, déjà très fragiles. D’autant que les budgets consacrés à l’éducation artistique et culturelle, source d’emploi pour les artistes, sont aussi en diminution significative.
Nous demandons donc solennellement au ministère de la Culture :
• Une révision immédiate à la baisse des critères d’accès des différentes aides au projet et au conventionnement pluriannuel.
• Une prise en compte du volume d’emploi rémunéré sur les répétitions et les dates de représentations plutôt que la nature du contrat qui lie les compagnies aux structures.
• Une réaffirmation forte du rôle du service public de la culture, garant d’un accès équitable à la création et à la diffusion sur tout le territoire.
• La défense du Fonpeps dans le cadre de sa renégociation, en garantissant son volume à hauteur de 60 millions d’euros en 2026.
Il y a urgence. Nous attendons des décisions...
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